• Comportement du chien et
    du chat
  • Celui qui connait vraiment les animaux est par là même capable de comprendre pleinement le caractère unique de l'homme
    • Konrad Lorenz
  • Biologie, neurosciences et
    sciences en général
  •  Le but des sciences n'est pas d'ouvrir une porte à la sagesse infinie,
    mais de poser une limite à l'erreur infinie
    • La vie de Galilée de Bertold Brecht

Complexe APC/C
Organisation générale des coactivateurs Cdc20 et Cdh1

Sommaire

définition

Les coactivateurs Cdc20 et Cdh1, protéines WD40 adaptatrices de l’APC/C, assurent la reconnaissance structurée des substrats et la régulation temporelle de l’ubiquitination mitotique.

L’APC/C requiert des cofacteurs temporaires pour sa pleine activité :

  • Cdc20 (Cyclosome division cycle 20), actif pendant la métaphase-anaphase,
  • Cdh1 (Cdc20 homolog 1) actif durant la fin de mitose et la phase G1.
Paramètre Cdc20 Cdh1
Moment
d’expression
maximal
G2-mitose Fin de mitose-G1
Activation
principale
  • Levée du SAC
  • Déphosphorylation
    partielle d’APC/C
  • Baisse des CDK
    Déphosphorylation globale
    des sous-unités APC/C
Coactivateur
de
APC/CCdc20
(prométaphase
anaphase)
APC/CCdh1
(sortie de mitose et G1)
Inhibition
en G2-M
Phosphorylations inhibitrices
(CDK et MCC - MAD2/
BUBR1/BUB3 -)
Hyperphosphorylation par
CDK1/2 (pas d’activation possible
avant la mitose tardive)
Blocage
spécifique
SAC/MCC
séquestrent Cdc20
  • Aucune inhibition SAC
  • Uniquement inhibition par CDK
Déclencheur
d’activation
Attachement bipolaire
des chromosomes
extinction SAC
Sortie de mitose
chute CDK1/cycline B
Fonction
principale
Dégradation de la
sécurine et des cyclines B
déclenchement de l’anaphase
Dégradation des facteurs
pro-S (Skp2, Geminin)
tabilisation du G1
Dégradation du
coactivateur
  • Autoubiquitination par
    APC2-APC11 en anaphase
  • APC/CCdh1 en G1
Rôle dans
la transition
Active la séparation
des chromatides
Prépare la transition G1 S
Rôle dans
la stabilité
génomique
Correct attachement
des kinétochores
prévention de l’aneuploïdie
  • Prévention du re-licensing
  • Limitation des facteurs pro-S
Interconnexion
avec SCF
Dégradation par SCF via
autoubiquitination assistée
Dégradé par SCFcycline F
+ SCFβ-TrCP
Retour à
l’état actif
Cycle suivant :
réaccumulation en G2
Cycle suivant :
déphosphorylation
en fin de mitose

 

Ces coactivateurs confèrent à l’APC/C sa spécificité de substrat et sa régulation temporelle, assurant la succession ordonnée des événements de dégradation indispensables à la progression mitotique et à la transition vers la phase G1.

APC/C et coactivateurs
APC/C et coactivateurs
(Figure : vetopsy.fr d'après Bansal et Tiwari)

Structure des coactivateurs Cdc20 et Cdh1

Structure des coactivateurs Cdc20 et Cdh1
Structure des coactivateurs Cdc20 et Cdh1
(Figure : vetopsy.fr d'après Bansal et Tiwari)

Domaines WD40

Les coactivateurs Cdc20 et Cdh1 appartiennent à la famille des protéines WD40, caractérisées par la présence d’environ sept répétitions WD formant une structure en propeller β.

bien

Le domaine WD est étudié dans un chapitre spécifique.

Cette architecture crée une surface concave adaptée à la reconnaissance des motifs de dégrons, i.e. D-box, KEN-box et motif ABBA portés par les substrats.

Les coactivateurs agissent comme des récepteurs adaptateurs, identifiant les signaux de dégradation présents sur les protéines cibles, et orientant ces substrats vers le site catalytique du complexe APC/C.

APC/C et dégrons
APC/C et dégrons
(Figure : vetopsy.fr d'après Davey et Morgan)

Extrémité N-terminale

Structure commune

1. L'extrémité N-terminale des coactivateurs, d’environ 200 à 250 résidus, est intrinsèquement flexible et peu structurée en l’absence du complexe et contient plusieurs motifs régulateurs conservés qui orchestrent l’interaction dynamique du coactivateur avec l’APC/C.

a. Cette région établit des contacts transitoires avec les sous-unités APC3 et APC8, deux composants de l’arche TPR (tetratricopeptide repeat) du complexe, qui servent de plateformes d’ancrage pour les coactivateurs.

Cette zone N-terminale s’enroule partiellement autour de l’arche TPR, créant un réseau d’interactions hydrophobes et ioniques qui stabilisent l’association initiale du coactivateur.

Interactions de Cdh1
Interactions de Cdh1
(Figure : vetopsy.fr d'après Chang et coll)

b. Le degré de flexibilité intrinsèque de la région N-terminale varie entre les deux coactivateurs.

  • Celle de Cdc20 est plus flexible et désordonnée en l’absence de l’APC/C, adoptant une structure partiellement stabilisée seulement lors de son ancrage à APC8 et APC3.
  • Celle de Cdh1, en revanche, présente une conformation plus compacte et un repliement local stabilisé par des interactions intramoléculaires, ce qui favorise une association plus stable avec l’APC/C et une activité prolongée pendant la phase G1.

2. L’extrémité N-terminale comprend un motif C-box (Cdc20-box), i.e. résidus 77-84 de Cdc20, essentiel pour la fixation au cœur du complexe, en interagissant dans une cavité de APC8 (Mechanisms for the temporal regulation of substrate ubiquitination by the anaphase-promoting complex/cyclosome 2019).

a. Elle initie la capture et favorise la transition vers un état “ ouvert ” apte au recrutement du substrat.

Elle est indispensable pour former un APC/C-coactivateur compétent catalytiquement car son altération abolit l’activation.

b. L'exposition de la C-box varie entre les deux coactivateurs.

  • Chez Cdc20, ce motif est plus exposé et dynamique, facilitant une interaction transitoire avec APC8 compatible avec une activation rapide et temporaire en mitose.
  • Chez Cdh1, la C-box est enfouie dans une boucle plus rigide, ce qui stabilise la liaison au complexe et contribue à la persistance du mode APC/CCdh1 après l’anaphase.
Structure d'APC/CCdc20
Structure d'APC/CCdc20
(Figure : vetopsy.fr d'après Zhang et coll)

3. La région intermédiaire, entre la C-box et le domaine WD40, des coactivateurs contient des motifs courts à polarité basique.

a. Ils participent à la stabilisation de leur ancrage sur la plateforme TPR de l’APC/C.

b. Ces deux motifs sont soumis à une régulation par phosphorylation dépendante de CDK1.

  • En mitose, CDK1 phosphoryle des sérines/thréonines voisines du motif, inhibant la liaison au complexe APC/C et empêchant toute activation prématurée.
  • À la sortie de mitose, la chute de l’activité cycline B/CDK1 et la déphosphorylation progressive assurée principalement par PP2A-B55 et PP1 rétablissent l’interaction électrostatique avec les sous-unités du module TPR et activent l’association du coactivateur.

Chez la levure, la déphosphorylation par la phosphatase Cdc14 restaure la charge positive locale de la région.

4. La Box1 est située dans la région N-terminale, juste en aval de la C-box et constitue un second site d’ancrage entre le coactivateur et le module TPR de l’APC/C, notamment avec APC6 et APC8.

a. Chez Cdc20, la Box1 participe à la stabilisation transitoire du complexe APC/CCdc20 durant la métaphase.

  • Elle agit en synergie avec la C-box, renforçant l’association initiale avec le module TPR, avant que le MIM/KILR n’assure le verrouillage complet.
  • Cette interaction reste toutefois labile, cohérente avec la fonction temporaire de Cdc20 comme coactivateur mitotique.

b. Chez Cdh1, la Box1 est plus structurée.

  • Elle forme une hélice amphipathique stabilisée par des interactions intramoléculaires et contribue à la fixation durable au module TPR.
  • Combinée à la queue IR, elle confère à APC/CCdh1 une stabilité post-mitotique prolongée, essentielle au maintien du complexe actif pendant la phase G1.

c. La Box1 de Cdc20 et celui de Cdh1 sont régulés par phosphorylation CDK1-dépendante.

  • Phosphorylée, elle provoque une perte d’affinité pour la plateforme TPR.
  • Déphosphorylée, elle rétablit un ancrage stable sur la plateforme TPR, permettant l’association productive du coactivateur avec l’APC/C.

Différences structurales entre Cdc20 et Cdh1

Cdc20 possède plusieurs motifs spécifiques qui ne sont pas retrouvés chez Cdh1.

1. Un motif CRY-box (Cys-Arg-Tyr) est aujourd’hui considéré comme une variante fonctionnelle ou un équivalent partiel du motif ABBA (Functional analysis of Cdc20 reveals a critical role of CRY box in mitotic checkpoint signaling 2024).

a. Le motif CRY agit comme un élément de reconnaissance secondaire permettant d’optimiser l’orientation du substrat porteur de D-box ou KEN-box sur le site de liaison de l’APC/C.

  • Il stabilise transitoirement le complexe APC/CCdc20-substrat en créant un pont électrostatique entre la surface basique de Cdc20 et le sillon latéral d’APC3/APC8, contribuant à la mise en place de la conformation " ouverte " active du complexe.
  • Ainsi, la CRY-box n’interagit pas directement avec l’ABBA du substrat, mais pré-organise la conformation du propeller WD40 pour en améliorer la reconnaissance.

2. Cdc20 contient un domaine MIM (Mad2-interacting motif), appelé aussi MBM (Mad2-Binding Motif) pour l'interaction avec O-Mad2.

Remarque : le motif KILR de Cdc20 se trouve au centre du domaine MIM.

Extrémité C-terminale

1. À l'extrémité C-terminale, un motif IR-tail (Isoleucine-Arginine) se fixe dans une cavité du sous-complexe APC3-APC6, renforçant la stabilité de la liaison (loupe régulation par phosphorylation/déphosphorylation de l'APC/C).

Ces motifs IR sont présents dans les sous-unités du module TPR.

2. Cette disposition permet au domaine WD40 de liaison du substrat des coactivateurs d’être flexible dans sa position en fonction des partenaires de liaison.

La similitude structurelle de la région de liaison C-box d’APC8 et des régions de liaison IR-tail d’APC3 est importante pour la régulation fonctionnelle de l’APC/C par le complexe de point de contrôle mitotique (MCC), qui se lie au complexe APC/C via l’interaction de la queue IR du Cdc20 avec la C-box d’APC8.

Coactivation Cdc20 du complexe APC/C
Coactivation Cdc20 du complexe APC/C
(Figure : vetopsy.fr d'après Bansal et Tiwari)

Interaction coactivateurs/APC10

1. En parallèle, les coactivateurs s’associent à APC10 pour former un module de co-reconnaissance du substrat, disposé à proximité immédiate du site catalytique APC2-APC11.

Les reconstructions cryo-EM à haute résolution ont révélé que le propeller WD40 du coactivateur et la sous-unité APC10 encadrent le substrat selon une géométrie en pince, créant une poche bivalente de stabilisation.

a. Le substrat est ainsi maintenu par un pontage double :

  • la face concave du domaine WD du coactivateur interagit directement avec le dégron, i.e. D-box, KEN-box et motif ABBA du substrat,
  • APC10 établit un contact complémentaire avec une région peptidique du substrat adjacente au dégron, stabilisant son ancrage dans la poche de reconnaissance formée avec le coactivateur et orientant la lysine cible vers le site catalytique du complexe.
Interactions du domaine WD40 des coactivateurs avec APC/C
Interactions du domaine WD40 des coactivateurs avec APC/C
(Figure : vetopsy.fr d'après Alfieri et coll)

b. La disposition relative du propeller WD40 et d’APC10 diffère légèrement selon le coactivateur engagé.

  • Dans APC/CCdc20, le propeller est orienté à un angle d’environ 25-30° par rapport à APC10, configuration ouverte favorisant un accès rapide aux substrats porteurs de D-box.
  • Dans APC/CCdh1, l’angle est réduit à ~15°, rapprochant le propeller d’APC10 et formant une poche plus compacte, mieux adaptée à la reconnaissance des KEN-box et ABBA motifs.

c. Ce système coopératif, souvent décrit comme un " double verrou de reconnaissance ”, permet un positionnement précis du substrat face au module catalytique APC2-APC11, garantissant l’ubiquitination séquentielle et processive.

2. Cette organisation modulaire permet à l’APC/C de basculer entre des états conformationnels ouverts et fermés, modulant l’accès des substrats selon le coactivateur engagé (Cdc20 ou Cdh1).

bien

Par la modulation de l’angle et de la position de leurs propellers WD40, les coactivateurs orchestrent la succession ordonnée des ubiquitinations, au cours de la mitose pour Cdh1 et de la sortie de mitose pour Cdc20.

Succession fonctionnelle des coactivateurs Cdc20 et Cdh1

Cdc20 et Cdh1 agissent de manière séquentielle pour assurer la continuité fonctionnelle de l’APC/C au cours du cycle cellulaire.

  • Cdc20, actif durant la métaphase-anaphase, déclenche la dégradation rapide de la sécurine et des cyclines mitotiques, conditionnant la séparation des chromatides.
  • Cdh1 prend le relais en sortie de mitose, prolongeant l’activité du complexe pour éliminer les substrats post-mitotiques, stabiliser la phase G1 et préparer la cellule à un nouveau cycle.
bien

Le rôle de Cdc20 et le rôle de Cdh1 sont étudiés dans leur chapitre spécifique.

Paramètre Cdc20 Cdh1
Moment
d’expression
maximal
G2-mitose Fin de mitose-G1
Activation
principale
  • Inactivation du SAC
  • Déphosphorylation
    partielle d’APC/C
  • Baisse des CDK
    D éphosphorylation globale
    des sous-unités APC/C
Coactivateur
de
APC/CCdc20 (anaphase) APC/CCdh1
(sortie de mitose et G1)
Inhibition
en G2-M
Phosphorylations inhibitrices
(CDK et MCC - MAD2/
BUBR1/BUB3 -)
Hyperphosphorylation par
CDK1/2 (pas d’activation possible
avant la mitose tardive)
Blocage
spécifique
SAC/MCC
séquestrent Cdc20
  • Aucune inhibition SAC
  • Uniquement inhibition par CDK
Déclencheur
d’activation
Attachement bipolaire
des chromosomes
extinction SAC
Sortie de mitose
chute CDK1/cycline B
Fonction
principale
Dégradation de la
sécurine et des cyclines B
déclenchement de l’anaphase
Dégradation des facteurs
pro-S (Skp2, Geminin)
tabilisation du G1
Dégradation du
coactivateur
  • Autoubiquitination par
    APC2-APC11 en anaphase
  • APC/CCdh1 en G1
Rôle dans
la transition
Active la séparation
des chromatides
Prépare la transition G1 S
Rôle dans
la stabilité
génomique
Correct attachement
des kinétochores
prévention de l’aneuploïdie
  • Prévention du re-licensing
  • Limitation des facteurs pro-S
Interconnexion
avec SCF
Dégradation par SCF via
autoubiquitination assistée
Dégradé par SCFcycline F
+ SCFβ-TrCP
Retour à
l’état actif
Cycle suivant :
réaccumulation en G2
Cycle suivant :
déphosphorylation
en fin de mitose

Implications biologiques et pathologiques

La régulation fine de Cdc20 et Cdh1 est essentielle au maintien de la stabilité génomique et à la progression ordonnée du cycle cellulaire (The Role of the APC/C and Its Coactivators Cdh1 and Cdc20 in Cancer Development and Therapy 2022).

1. Cdc20, déterminant de la ségrégation chromosomique, est fréquemment surexprimé dans les cancers (sein, poumon, côlon).

a. Cette surexpression favorise :

  • l'instabilité chromosomique,
  • la progression mitotique aberrante,
  • la résistance au blocage du SAC.

b. Cdc20 est une cible thérapeutique privilégiée pour les stratégies antimitotiques et de sensibilisation (CDC20: a novel therapeutic target in cancer 2023).

2. À l’inverse, Cdh1 agit comme un frein tumoral et un gardien de la quiescence.

a. Sa perte ou sa dérégulation entraîne :

  • une prolifération incontrôlée,
  • une re-réplication de l’ADN,
  • une aneuploïdie, i.e. nombre de chromosomes incorrect.

b. Les études récentes confirment également son rôle dans :

La compréhension de ces deux coactivateurs, à la fois complémentaires et antagonistes, ouvre des perspectives majeures en oncologie moléculaire et en pharmacologie du cycle cellulaire, notamment pour le développement de modulateurs spécifiques du complexe APC/C.

Mécanisme du complexe APC/C