Histoire de l'éthologie
Courant naturaliste : Charles Darwin et l'évolutionnisme

Citation

« Ceux que nous appelions des brutes eurent leur revanche quand Darwin nous prouva qu'ils étaient nos cousins. » "

Georges Bernard Shaw

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Sommaire

Le courant naturaliste, déjà apparu avec Aristote (382-324 av.JC) et issu de l'approche zoologique, se développe au XVIIIe siècle. Le courant naturaliste voit naître les pionniers et les premières classifications de l'Histoire Naturelle.

Ce sont des personnages comme :


darwin Tous ces scientifiques, ainsi que leurs prédécesseurs et leurs successeurs, sont étudiés sous le point de vue du fixisme et de l'évolutionnisme dans des pages spéciales ( infos).

Charles Darwin (1809-1882)

C'est surtout Charles Darwin (1809-1882) qui a influencé l'éthologie moderne par sa théorie de la sélection naturelle qui a jeté les bases de :

  • l'aspect évolutif d'un comportement, qui implique un rôle important de l'apprentissage ;
  • l'instinct ( infos) ;
  • la filiation animaux/homme dans " La Descendance de l'Homme ".


Je développe la vie et l'oeuvre de Darwin dans plusieurs pages ( infos) qui expliquent sa théorie de l'évolution ( infos).

« Si des variations utiles à un être organisé apparaissent, les individus affectés doivent assurément avoir une meilleure chance de l'emporter dans la lutte pour l'existence, de survivre, et, en vertu de l'hérédité, de produire des descendants semblablement caractérisés. C'est ce principe de conservation, de survivance du mieux adapté, que j'appelle sélection naturelle. Il conduit à l'amélioration de chaque être dans ses rapports avec les conditions organiques et inorganiques dans lesquelles il vit ; et, par conséquent, vers ce qu'on peut, dans la majorité des cas, considérer comme un état progressif d'organisation. » L'origine des espèces p : 145

Aspect évolutif d'un comportement

Antilope-girafeEn effet, le comportement est un élément-clef pour l'évolution des espèces par son implication dans la sélection naturelle des individus : les plus aptes subsistent et transmettent ainsi leur " potentialités " à un plus grand nombre d'individus.

  • Darwin parlait de descendance avec modifications ( infos).

N'oublions pas que les lois de la génétique étaient en cours d'élaboration par Gregor Mendel (1822-1884) dont le travail tomba dans l'oubli jusqu'au début du XXe siècle ( infos).

  • Darwin pensait comme Jean-Baptiste de Lamarck (1744-1829) qu'il y avait transmission des caractères acquis ( infos) et que, même s'il s'en défendait, l'environnement et les habitudes pouvaient modifier les espèces.

Dans sa célèbre lettre écrite en janvier 1844 à Joseph Dalton Hooker (1817-1911), il écrit ( infos) : « Le ciel me préserve des sottes erreurs de Lamarck, de sa " tendance à la progression " , et des adaptations " dues à la volonté des animaux ", etc. ; mais les conclusions auxquelles je suis amené ne diffèrent pas beaucoup des siennes, bien que les agents des modifications soient entièrement différents. »

Darwin découvrit le concept de sélection sexuelle à l'origine de la spéciation des espèces ( infos).

Cendrawasih« Les mâles ont acquis la conformation qu’ils ont aujourd’hui, non pas parce qu’elle les met à même de remporter la victoire dans la lutte pour l’existence, mais parce qu’elle leur procure un avantage sur les autres mâles, avantage qu’ils ont transmis à leur postérité mâle seule. C’est l’importance de cette distinction qui m’a conduit à donner à cette forme de sélection le nom de sélection sexuelle. » La descendance de l'homme p : 230.

Filiation animaux/homme

Charles Darwin, dans " La Descendance de l'Homme ", explique que l'homme « descend d'un mammifère velu » et propose une évolution possible à partir d'êtres inférieurs ( infos).

Puis, il essaie d'expliquer son intelligence, son caractère social du point de vue évolutionniste : il défend comme précédemment la transmission des caractères acquis et considère l'apprentissage comme un moteur puissant.

« Il y a sans doute une difficulté à vaincre avant d’adopter pleinement la conclusion à laquelle nous sommes ainsi conduits sur l’origine de l’homme, c’est la hauteur du niveau intellectuel et moral auquel s’est élevé l’homme. Mais quiconque admet le principe général de l’évolution, doit reconnaître que, chez les animaux supérieurs, les facultés mentales sont, à un degré très inférieur, de même nature que celles de l’espèce humaine et susceptibles de développement. L’intervalle qui sépare les facultés intellectuelles de l’un des singes supérieurs de celles du poisson, ou les facultés intellectuelles d’une fourmi de celles d’un insecte parasite, est immense. Le développement de ces facultés chez les animaux n’offre pas de difficulté spéciale ; car, chez nos animaux domestiques, elles sont certainement variables, et ces variations sont héréditaires. Il est incontestable que la haute importance de ces facultés pour les animaux à l’état de nature constitue une condition favorable pour que la sélection naturelle puisse les perfectionner. La même conclusion peut s’appliquer à l’homme ; l’intelligence a dû avoir pour lui, même à une époque fort reculée, une très grande importance, en lui permettant de se servir d’un langage, d’inventer et de fabriquer des armes, des outils, des pièges, etc. Ces moyens, venant s’ajouter à ses habitudes sociales, l’ont mis à même, il y a bien longtemps, de s’assurer la domination sur tous les autres animaux.
Darwin en singeLe développement intellectuel a dû faire un pas immense en avant quand, après un progrès antérieur déjà considérable, le langage, moitié art, moitié instinct, a commencé à se former ; car l’usage continu du langage agissant sur le cerveau avec des effets héréditaires, ces effets ont dû à leur pousser au perfectionnement du langage. La grosseur du cerveau de l’homme, relativement aux dimensions de son corps et comparé à celui des animaux inférieurs, provient surtout, sans doute, comme le fait remarquer avec justesse M. Chauncey Wright, de l’emploi précoce de quelque simple forme de langage ; – cette machine merveilleuse qui attache des noms à tous les objets à toutes les qualités, et qui suscite des pensées que ne saurait produire la simple impression des sens, pensées qui, d’ailleurs, ne pourraient se développer sans le langage, en admettant que les sens les aient provoquées. Les aptitudes intellectuelles les plus élevées de l’homme, comme le raisonnement, l’abstraction, la conscience de soi, etc., sont la conséquence de l’amélioration continue des autres facultés mentales.
Le développement des qualités morales est un problème plus intéressant et plus difficile. Leur base se trouve dans les instincts sociaux, expression qui comprend les liens de la famille. Ces instincts ont une nature fort complexe, et, chez les animaux inférieurs, ils déterminent des tendances spéciales vers certains actes définis ; mais les plus importants de ces instincts sont pour nous l’amour et le sentiment spécial de la sympathie. Les animaux doués d’instincts sociaux se plaisent dans la société les uns des autres, s’avertissent du danger, et se défendent ou s’entr’aident d’une foule de manières. Ces instincts ne s’étendent pas à tous les individus de l’espèce, mais seulement à ceux de la même tribu. Comme ils sont fort avantageux à l’espèce, il est probable qu’ils ont été acquis par sélection naturelle.
Un être moral est celui qui peut se rappeler ses actions passées et apprécier leurs motifs, qui peut approuver les unes et désapprouver les autres. Le fait que l’homme est l’être unique auquel on puisse avec certitude reconnaître cette faculté, constitue la plus grande de toutes les distinctions qu’on puisse faire entre lui et les animaux. J’ai cherché à prouver dans le quatrième chapitre, que le sens moral résulte premièrement, de la nature des instincts sociaux toujours présents et persistants ; secondement, de l’influence qu’ont sur lui l’approbation et le blâme de ses semblables
[ note de jpm : apprentissage] ; troisièmement, de l’immense développement de ses facultés mentales et de la vivacité avec laquelle les événements passés viennent se retracer à lui, et par ces derniers points il diffère complètement des autres animaux. » La descendance de l'homme p : 666-668 ( infos).

La planète des singesDarwin développe également la capacité de l'homme à aider ses semblables : c'est un précurseur du concept d'altruisme.

« Le désir d’aider les membres de leur communauté d’une manière générale, mais, plus ordinairement, le désir de réaliser certains actes définis, entraîne les animaux sociables.L’homme obéit à ce même désir général d’aider ses semblables, mais il n’a que peu ou point d’instincts spéciaux. Il diffère aussi des animaux inférieurs, en ce qu’il peut exprimer ses désirs par des paroles qui deviennent l’intermédiaire entre l’aide requise et accordée. Le motif qui le porte à secourir ses semblables se trouve aussi fort modifié chez l’homme ; ce n’est plus seulement un impulsion instinctive aveugle, c’est une impulsion que vient fortement influencer la louange ou le blâme, ainsi que leur disparition, repose sur la sympathie, sentiment qui, ainsi que nous l’avons vu, est un des éléments les plus importants des instincts sociaux. La sympathie, bien qu’acquise comme instinct, se fortifie aussi beaucoup par l’exercice et par l’habitude. Comme tous les hommes désirent leur propre bonheur, ils accordent louange ou blâme aux actions et à leurs motifs, suivant que ces actions mènent à ce résultat ; et, comme le bonheur est une partie essentielle du bien général, le principe du plus grand bonheur sert indirectement de type assez exact du bien et du mal. » La descendance de l'homme p : 669 ( infos).

Quelquefois, cette sympathie est inexistante ce qui permet à Darwin de proposer des explications qui seraient jugées racistes à l'heure actuelle et qui ont fortement influencé ses successeurs eugénistes ( infos).

HamletJe ne peux m'empêcher de finir sur la conclusion principale du livre de Darwin.

« Je regrette de penser que la conclusion principale à laquelle nous a conduit cet ouvrage, à savoir que l'homme descend de quelque forme d'une organisation inférieure, sera fort désagréable à beaucoup de personnes : Il n'y a cependant pas lieu de douter que nous descendons de barbares. Je n'oublierai jamais l'étonnement que j'ai ressenti en voyant pour la première fois une troupe de Fuégeens sur une rive sauvage et aride, car aussitôt la pensée me traversa l'esprit que tels étaient nos ancêtres. Ces hommes absolument nus, barbouillés de peinture, avec des cheveux longs et emmêlés, la bouche écumante, avaient une expression sauvage, effrayée et méfiante. Ils ne possédaient presque aucun art, et vivaient comme des bêtes sauvages de ce qu'ils pouvaient attraper ; privés de toute organisation sociale, ils étaient sans merci pour tout ce qui ne faisait pas partie de leur petite tribu. Quiconque a vu un sauvage dans son pays natal n'éprouvera aucune honte à reconnaître que le sang de quelque être inférieur coule dans ses veines. J'aimerais autant pour ma part descendre du petit singe héroïque qui brava un terrible ennemi pour sauver son gardien, ou de ce vieux babouin qui emporta triomphalement son jeune camarade après l'avoir arraché à une meute de chiens étonnés, - que d'un sauvage qui se plaît à torturer ses ennemis, offre des sacrifices sanglants, pratique l'infancicide sans remords, traite ses femmes comme des esclaves, ignore toute décence, et reste le jouet des superstitions les plus grossières. » La descendance de l'homme p : 677-678 ( infos)

Courant éthologique proprement dit

Le cadre très artificiel des expériences menées par les behavioristes ( infos) représente la principale critique de scientifiques issus du courant naturaliste ou zoologiste ( infos) qui s'intéressaient aux comportements des animaux.


Konrad Lorenz (1903-1989) et Nikolaas Tinbergen (1907-1988) peuvent être considérés comme les véritables fondateurs de la science du comportement comparé, l'éthologie.

AristoteRené DescartesCourant vitalisteCourant neurophysiologiste
Courant prépsychologiqueCourant behavioristeCourant naturaliste
Ethologie objectiveInné-Acquis
Ethologie précognitive
Ethologie cognitive

Bibliographie
  • Gheusi G. - La cognition animale - 3ème cycle professionnel des écoles nationales vétérinaires - Toulouse 2000
  • de Witt Hendrick C.D. - Histoire du développement et de la biologie - Volume, I, II, III - Presses polytechniques et universitaires romandes, Paris, 404, 460 et 635 p., 1992, 1993 et 1994
  • Eibl-Eibesfeldt I. - Ethologie - Biologie du comportement - Naturalia et Biologica Editions scientifiques Paris, 576 p., 1972
  • Bensch - Présentation de l'éthologie et des comportements - 3ème cycle professionnel des écoles nationales vétérinaires - Toulouse 2000
  • Campan R., Scapini F. - Ethologie, approche systémique du comportement - De Boeck Université, Bruxelles, 737 p., 2002
  • Université d'Oxford - Dictionnaire du comportement animal - Robert Laffont, Paris, 1013 p., 1990
  • Immelmann K. - Dictionnaire de l'éthologie - Pierre Mardaga Editeur, Liège, 296 p., 1990